Diougan Gwenc'hlan
Demat d’an holl
J’ai essayé de chercher sur le net les paroles et la traduction de la chanson d’Alan « Diougan Gwenc’hlan », sans succès. J’ai pu voir que ce texte relatait l’histoire du barde Gwenc’hlan. Je sais donc qu’il était un des druides les plus fermement opposés au christianisme. Je voudrai vous demander, Alan… Chanter cette chanson relève de quelle démarche ? La culture bretonne est tout de même beaucoup imprégnée de christianisme, et il me semblait, au travers de différentes paroles de vos chansons, que vous étiez… comment dire… en « accord » avec cela ? Non pas que certaines de vos chansons aient un côté strictement religieux à mes yeux, mais il me semblait qu’il y avait tout de même un peu de ce côté-là dans les textes que vous interprétiez.
Pour ma part je suis plutôt païen (ou même pour ce qui est de l’origine du monde je préfère croire en la Nature plutôt qu’en d’éventuels dieux), et je trouve « dommage » de voir souvent un côté un peu religieux si présent dans certaines gwerz, etc…
Loarwenn,
Je crois que la prophetie de Gwenc’hlan se trouve dans le Barzaz Breizh , de La Villemarque. il y a aussi An Alarc’h, Jenovefa et la melodie et les paroles de Ys.
Curieuse votre reflexion sur la chanson citee plus haut. J’ai pour ma part toujours eu la sensation qu’Alan etait un peu adepte du syncretisme: prendre ce qui est positif la ou on le trouve. En meme temps, je pense que certaines chansons ont aussi des relents de pantheisme, ce qui a mon avis n’est pas completement inconciliable avec un christianisme « ouvert ». Je connais des gens a Cambridge qui sont anglicans, mais egalement intyeresses par l’Islam des Soufis, et les traditions Celtiques, la Mystique Juive etc…Je pense que d’une maniere generale, la spiritualite est plus tolerante et ouverte que les religions « organisees ».
Il serait interessant de voir ce qu’en pense Alan.
Je précise que je ne suis en aucun cas « opposé » à telle ou telle religion. Je comprends et j’accepte pleinement que des personnes aient des croyances religieuses, bien évidemment. Après, croire en un dieu unique ou en plusieurs dieux, peu m’importe, je ne condamne pas tout. Ce que je pourrai faire comme sorte de reproche, néanmoins, c’est ce qui est accompli au nom des religions. Parfois une religion est utilisée comme prétexte pour commettre des actes inadmissibles…
Mais là encore, comme je le dis moi-même, la religion est « utilisée ». Dans ce cas il ne faut pas éprouver d’aversion envers la religion mais envers ceux qui la détournent. Je suis aussi tout à fait d’accord avec vous quand vous parlez de syncrétisme. Après tout je n’évoquais que mon sentiment par rapport à tout cela, mais peut-être suis-je influencé par mon manque de « croyance divine ».
D’ailleurs ce que vous dîtes de la spiritualité à la fin de votre réponse est très vrai. On peut croire en un éventail de choses sans pour autant « s’enfermer » dans telle ou telle religion.
Nozhvad,
Diougan Gwenc’hlan se trouve en effet dans le Barzhaz Breizh.
A mon tour de recopier ici les paroles chantées par Alan, sachant que la version complète compte une quarantaine de couplets.
(l’orthographe en breton est celle de mon édition du B.B.)
Diougan Gwenc’hlan
Pa guz ann heol, pa gouenv ar mor,
Me oar kana war dreuz ma dor
Pa oann yaouank me a gane ;
Pa’z onn deuet deut koz, me gan ive.
Me gan enn noz, me gan enn de
Ha me keuziet koulskoude.
Red eo d’ann holl mervel teir gwes,
Kent evid arzao enn-divez.
La Prophétie de Gwench’lan
Quand le soleil se couche, quand la mer s’enfle,
Je chante sur le seuil de ma porte.
Quand j’étais jeune; je chantais
Devenu vieux, je chante encore.
Je chante la nuit, je chante le jour,
Et je suis chagrin cependant.
Il faut que tous meurent trois fois,
Avant de se reposer enfin.
A galon,
Merci beaucoup cimsam, j’ai pu trouver la traduction française intégrale sur internet (voici le lien si cela intéresse quelqu’un : http://chrsouchon.free.fr/gwenlaf.htm ). J’ai remarqué il n’y a pas longtemps que le passage chanté par Alan a été repris par le groupe Merzhin en 2001.
Sur « Diougan Gwenc’hlan », comme vous voyez, pas d’appel à la guerre contre des « infidèles » chrétiens ou autres, une poésie très émouvante, évoquant la tristesse de ce druide, se « raisonnant » dans son espoir de renaissance.
Quelqu’un parle de mon « syncrétisme ». De temps en temps, j’entends des responsables de l’église catholique le villipender. Le calomniant même parfois en l’assimilant aux sectes et aux gouroux. Or il n’est pas besoin d’avoir beaucoup l’experience de la vie pour savoir que tout fait humain entraine des suites positives et des suites négatives. Certaines formes de « New-Age » ont tourné à la secte, alors que d’autres formes de syncrétismes sont vêcus de manière positive. Il y en a d’ailleurs une au VietNam.
La mienne est venue d’une reflexion qui a muri simplement au cours de ma jeunesse; et l’age adulte et l’age mur ne m’en ont pas détourné.
Il me parait évident que chaque culture, exprimant l’âme ou la personnalité d’un peuple, se « concrétise » dans tous les domaines de la vie: vie sociale, langue, musique, danse, habillement, arts, habitat, et aussi, spiritualité.
Quand une puissance quelconque n’impose pas à autrui ses vues, ses coutumes, sa religion, chaque peuple poursuit sa voie naturelle vers le spirituel, son angle « d’attaque » de la transcendance. Cela peut être une religion propre ou une variante de religion, comme il est lui-même la variante d’une civilisation.
On ne peut vivre très longtemps sur terre sans l’acceptation de l’autre. Sans l’acceptation de l’idée qu’on a tous tord et raison, de façons differentes, peut-être à des degrés différents (en effet celui qui empêche l’autre de vivre a quand même bien « peu raison » ! ). Nos échanges, nos tolérances devraient permettre à tous de percevoir en lui-même des éléments négatifs.
Par exemple, pour les femmes du monde entier, il devrait être difficile de ne pas reconnaître qu’il est bon d’être traitée sur un pied d’égalité. Certaines civilisations y sont moins défavorables que d’autres. Mais on peut imaginer que ces civilisations inégalitaires ont sû développer certaines valeurs qui ne sont pas à mettre à la poubelle. Si on évoque l’Islam, il y a de grands poètes, de grands savants, de grands esthètes, et il y a des éléments élevés dans plusieurs lectures du Coran, notamment le Soufisme.
Ce que j’ai dit pourrait porter à conclure: en Bretagne, une religion bretonne, variante d’une religion celtique. Cette logique extrême ne tiendrait d’autant moins qu’il faut admettre que la Bretagne est elle-même une terre de croisement, principalement entre deux cultures, une latine, une celtique. Mais ma position de principe reste vraie, qu’un breton n’a pas à s’inféoder au catholicisme romain; pas plus qu’on pourrait imaginer, sans être vraiment utopiste, un simple retour au druidisme.
Cette situation, d’être à cheval sur des frontières culturelles et géographiques, amène des reflexions sur la relativité des cultures, y compris des religions.
Je pourrai un jour développer ce sujet, si ça interesse quelqu’un (et si je trouve le temps…).
Mais, en tous cas, il est vrai que je crois que seule la synthèse des pensées et des spiritualités humaines peut prétendre être sur la route d’une Vérité. Cela signifie que même l’athéisme a le droit d’apporter son angle de vue.
Toujours cette dualité ou dialectique entre la nécessité de perpetuer des différences, tout en s’influençant en permanence. C’est mon syncrétisme.
Je suis intéressé par un éventuel (et futur) développement de ce sujet. Je ne trouve pas grand chose à répondre à ce que vous venez d’écrire, si ce n’est que j’admire vos idées et la noblesse de vos propos. Sans exagération, je pense que ce sont des gens tels que vous qui devraient être à la tête d’un état…
Alan et Loarwenn.
Je me joins a Loarwenn , je serais aussi interesse par une discussion/reflection sur ces idees. En attendant je suis tout-a-fait sur la longueur d’onde d’Alan dans ce qui est exprime plus haut. Le terme syncretisme que j’ai employe ne me pose personnellement aucun probleme dans ce qu’il recouvre. Ce sont en fait les religions organisees, tres souvent tres controlantes qui ont un probleme avec ca. La spiritualite est beaucoup plus ouverte, et considere que chacun peut avoir quelque chose d’interessant a dire, meme comme le souligne Alan, dans le cas de l’Atheisme. A ce sujet cependant je mettrai un petit bemol: on assiste depuis quelques annees a l’emergence de ce qu’on appelle ici (en Angleterre) »Le Nouvel Atheisme ». Bon , on a eu la Nouvelle Cuisine, les Nouveaux Philosophes, la Nouvelle Droite…Les nouveaux athees, malheureusement ne sont pas des plus ouverts dans la direction du Spirituel: c’est ce qu’on peut deduire en lisant /ecoutant des gens comme Richard Dawkins, Michel Onfray ou Christopher Hitchens. Mais il y a malgre tout des athees qui dialoguent.
Seulement , ils ne sont pas dans les news…D’accord aussi a 100% avec la mention des Soufis. A ce sujet, je recommande la lecture de Suhrawardi, un mystique qui vivait au XII eme siecle, en Perse.
A propos de Gwenc’hlan, il serait malgre tout juste de signaler que sa prophetie comporte des stances qu’Alan n’interprete pas dans sa version, et qui sont assez tranchantes pour ses ennemis:
Partie 3 de la complainte:
« Comme j’etais doucement endormie dans ma tombe froide, j’entendis l’aigle appeler au milieu de la nuit.
il appelait ses aiglons et tous les oiseaux du ciel,
Et il leurs disait en les appelant:
-Levez-vous vite sur vos deux aile!
Ce n’est pas de la chair pourrie de chiens ou de brebis: c’est de la chair chretienne qu’il nous faut!
Une autre tradition lui fait dire : »Un jour viendra ou les pretres du Christ seront poursuivis, ou on les huera comme des betes fauves »
« Ils mourront tous par bandes, sur le Menez-Bre, par bataillons »
Il faut souligner que le barde avait ete capture par un « prince etranger » qui l’avait laisse mourir dans un cachot, apres lui avoir fait crever les yeux.
Il avait quelques raisons d’en vouloir a certains…
Toutes ces informations sont tirees du Barzaz Breiz,
Edition Librairie Academique Perrin 1963.
Il y a bien longtemps que je n’ai pas chanté Diougan Gwenc’hlan. Vous faites bien de me rappeler que j’avais choisi des parties qui me plaisaient. J’avais dit ou écrit quelquepart qu’effectivement Gwenc’hlan était considéré comme un des rares druides s’étant opposé frontalement au Christianisme.
J’ai interprété de nombreux chants de la tradition. Presque toujours, j’ai cherché le compromis où le respect du texte ne s’oppose pas trop à mes propres idées. En général, mon interprétation se situe à mi-chemin.
Dans ce cas précis, j’ai laissé de côté sa violence, tout en admirant le courage de ce seul contre tous. J’en veux à l’église chrétienne et catholique d’avoir combattu une spiritualité tout aussi valable.
Dans une spiritualité moderne, il y a autant place pour des recherches druidiques que pour d’autres. Il serait, par contre, d’autant plus difficile d’être strictement « druidique » qu’il est impossible de se baser sur un druidisme ancien en grande partie perdu.
Pour revenir à l’athéisme, on aura compris qu’il y en a un qui est pas mal: le bouddisme. Là encore, je ne pourrais y entrer totalement, notamment son folklore inadapté.
Me permettrez-vous de discuter la thèse, à mon sens erronée, d’une église chrétienne et catholique qui aurait écrasé l’ancienne spiritualité celte, que l’on connaît malheureusement trop mal, mais dont on soupçonne la grande richesse métaphysique ? En effet, à l’encontre de ce que veulent croire certains tenants d’un néo-paganisme fumeux, l’implantation du christianisme en Bretagne et en Gaule n’a pas donné lieu à une guerre avec le druidisme ; elle s’est au contraire accompagnée d’une symbiose parfaitement harmonisée entre l’ancienne religion celtique et la nouvelle religion chrétienne, qui a incorporé et adapté ce qui devait être conservé de la forme celtique. Pour citer un exemple connu, la fête celtique de la Samain, qui célébrait au premier novembre l’unité du monde visible et du monde invisible, ou du monde des vivants avec celui des morts, a été christianisée sous le nom de Toussaint.
L’exemple irlandais illustre bien lui aussi le passage opéré sans heurt du druidisme au christianisme. En témoigne la rapidité avec laquelle saint Patrick a christianisé cette île où, contrairement à la Bretagne insulaire et à l’Armorique, l’ancien culte celtique n’y avait subi aucune interruption sous l’effet d’une conquête extérieure. La rapide conversion de l’Irlande s’explique par le ralliement au christianisme de la classe des druides, dont la majeure partie des membres a été ordonnée à la prêtrise et a fourni au christianisme ses nouveaux cadres. Il est possible qu’une fraction marginale des druides, au lieu d’intégrer le clergé et la société chrétienne, ait pu marquer son opposition, mais il s’agit d’un phénomène très minoritaire.
Une Église celtique, qui détenait les derniers restes de l’enseignement hérités du druidisme, a longtemps cohabité en Gaule avec l’Église romaine tout en préservant quelque temps sa spécificité, avant qu’elle ne disparaisse en se fondant dans l’Église officielle. Si la tradition culturelle de la Bretagne est restée fortement imprégnée de l’esprit chrétien, c’est bien parce que l’inspiration celtique originelle n’en a pas été altérée sous sa forme chrétienne.
Qu’on le veuille ou non, le christianisme reste le seul vecteur vivant de l’ancienne spiritualité celte. Je conçois que l’on soit rebuté par les positions et les discours de l’Église officielle, mais c’est à nous qu’il appartient de retrouver l’esprit et la vie que recèle le message du christianisme, derrière ses textes sacrés, son rituel et son symbolisme.
L’interlocuteur qui m’a amené à parler de Gwenc’hlan m’a incité à parler de druides récalcitrants au Christianisme.
J’ai bien précisé qu’ils étaient rares.
On sait bien que la majorité d’entre eux a adopté et adapté, celtisé cette nouvelle religion. Les moines celtes ont créé un Christianisme celtique, plus proche de l’Eglise orientale que de Rome. Ce métissage religieux explique en partie la non-violence de la transition. On sait aussi que Rome voyait d’un très mauvais oeil cette église celtique, qu’a été fait tout ce qui était possible pour l’éradiquer. But atteint vers le 10ème siècle.
Des éléments de culture celtique, voire pré-celtique ont perduré de manière quelque peu fossile dans la pratique (peut-être la pensée?) religieuse du peuple, en particulier de Bretagne bretonnante.
Par contre, si on fait l’inventaire des éléments celtiques ou bretons dans la religion pratiquée aujourd’hui par les bretons, si on les compare aux éléments latins, hébraïques, grecs, etc., il me semble évident que la « parité » est bien loin, c’est peu de le dire.
Cela dit, je ne suis pas un farouche adversaire du Christianisme. Il a apporté un message d’Amour, de fraternité, et même des rîtes qui sont aux antipodes de la cruauté de certains rîtes antiques, notamment druidiques.
Ce serait presque le folklore latin imposé par Rome qui me choquerait le plus, sachant qu’il véhicule, de manière insidieuse, l’importation de formes esthétiques et psychologiques totalement étrangères. En cela il y a colonisation et impérialisme. Je ne pense pas que ce soit la volonté du Christ auquel vous croyez.
Je suis d’accord avec vous sur le fait que l’Église romaine officielle a servi de vecteur à des enjeux politiques qui ont considérablement nui à l’image de la religion. Le christianisme n’a cessé de souffrir d’une contradiction entre le message du Christ et le rhabillage politico-social sous lequel on a servi cet enseignement. Mais rien ne nous oblige à nous laisser piéger en nous privant du seul éclairage encore vivant qui subsiste de la spiritualité des anciens mondes. De la même façon, je ne refuse pas de lire, d’écrire et de compter, même si certains des instits qui m’ont enseigné ces matières étaient des cons qui m’ont martyrisé !
Le christianisme des origines constitue l’un des courants représentatifs d’une authentique spiritualité universelle ; à travers ses composantes grecques et hébraïques, il a hérité d’éléments orientaux, chaldéens, égyptiens… dans lesquels les derniers druides celtes se sont visiblement reconnus. Si ces druides ont pu sans difficulté intégrer et assimiler ces éléments, il faut croire qu’ils ne s’y sont pas sentis étrangers et qu’ils ne les ont pas trouvés incompatibles avec leur propre tradition spirituelle.
L’Église celtique a joui d’un prestige considérable parmi le peuple breton, sans que l’usage de la force ait été nécessaire pour asseoir son autorité morale. On ne peut que regretter qu’elle ait été absorbée par l’Église romaine. Néanmoins, il existe encore de nos jours un catholicisme breton avec sa richesse et ses particularités, un catholicisme marqué d’un certain mysticisme, d’une inspiration et d’une élévation que l’on ne retrouve pas dans le catholicisme voisin, comme celui de la Vendée, qui est beaucoup plus terre-à-terre. Il n’a jamais été nécessaire de recourir à la force armée pour que cette ferveur perdure et pour qu’elle anime l’âme et la culture e la Bretagne à travers les siècles.
Je voudrais citer un seul exemple – il y en aurait tant d’autres – de cet héritage ancien toujours perceptible dans le christianisme celtique. Il parait évident, pour quiconque n’est pas conditionné par un dogmatisme bigot, que la Vierge Marie est une reprise de la Grande Déesse des origines, une figure essentielle des anciens cultes, ce qui explique sans doute la ferveur dont son culte a fait l’objet dans les pays celtiques. On aura du mal, sans doute, à prendre à la lettre le dogme de Marie qui enfante malgré sa virginité, ce qui de nos jours fait rire même les enfants ; il en va autrement si l’on renoue avec le symbolisme profond que véhicule cette allégorie universelle, tant au niveau cosmologique qu’au niveau de l’être humain intérieur. Il est plus que vraisemblable que l’Église celtique entendait et comprenait ce symbolisme féminin.
J’irais même plus loin. On observe, dans les sculptures de quelques églises et monuments religieux bretons, la présence de motifs aussi étrangers au dogme catholique officiel que celui d’une sirène ou d’une déesse serpent, dont semble-t-il le sens symbolique n’échappait pas à l’artiste. Une figure mythique comme Dahut, sous son aspect à la fois sensuel et meurtrier, s’oppose en apparence à la figure protectrice de la bonne fée, et plus encore à la Vierge Marie bienveillante et chaste, mais du point de vue métaphysique, la Vierge Marie, dans sa nature profonde et dans sa compréhension étendue, ne diffère pas de la fée Morgane ou de la princesse Dahut, qui lui sont complémentaires, même si ces personnages féminins semblent se distinguer par une apparente différence de qualité sur laquelle le dogme chrétien officiel et moraliste n’a pas manqué d’insister.
Sachons donc, comme le dit le Christ, trier le bon grain et l’ivraie. Je trouverais dommage de nous priver de la spiritualité vivante que nous transmet encore le vecteur chrétien catholique, tout éloigné qu’il soit de la perfection.
Je ne vois pas de divergence majeure avec vous. Je ne vois aucun inconvénient à ce que vous continuez à manifester votre foi, d’autant plus si elle conserve quelques éléments celtiques.
Comme vous tolerez certainement mon point de vue que le métissage est bien trop inégal. Si on y enlevait ce qui vient des cultures, folklores, psychologies, mythes, rites de Méditerranée et du Proche-Orient, je doute vraiment qu’on pourrait toujours appeler ça du Catholicisme ou du Christianisme. Mon rejet progressif et reflechi a été il est vrai aussi influencé par les différents passifs des autorités religieuses. J’apprécie toujours certains aspects du Christianisme. Mais je suis relativiste en matière religieuse.
Je ne me sens nullement en opposition avec vous, bien au contraire. Je ne défends en aucun cas l’indéfendable, comme l’impérialisme césaro-papiste. J’insiste simplement sur l’importance considérable qu’a joué l’ancien esprit celte dans le christianisme, qu’il a considérablement influencé et marqué de son empreinte. Ce n’est donc pas trahir sa mémoire que de dire que, sur le plan spirituel et religieux, le seul lien vivant et authentique qui subsiste et nous rattache encore à l’ancien monde celtique passe par le vecteur chrétien.
En revanche, il en va tout autrement dans le domaine culturel et artistique. Sur ce plan-là, rien n’interdit à l’imagination et à la vision, dont quelques artistes inspirés ont su faire preuve, de revisiter l’ancien monde et de s’employer à faire revivre son esprit. Votre art y a puissamment contribué, et j’espère que vous continuerez encore longtemps à nous transmettre ce souffle.