Bonjour,
Je demande pardon à l’avance pour la longueur de ce massage
c’est mon premier message sur ce forum. Je me présente rapidement. Je suis terrienne, née à Rennes et étudiante en Lettres Modernes à Rennes 2.
J’ai également vécu à Taiwan où sa position vis à vis de la Chine fait de l’identité une question centrale.
Je souhaite d’abord rebondir sur le cas Hugo.
Concernant Victor Hugo, je trouve au contraire qu’on le perd de vue dans l’enseignement, notamment en Lettres Modernes. Ce qui est dommage, cela éviterait de réduire sa personne, son combat à un océan de verbes et de mots. C’est vrai que c’est la mode de faire des procès à tout le monde aujourd’hui: « Sartre est un perdant, il a tout raté », « Robespierre: un assoiffé de sang ! »…
Pourtant, le combat de Hugo contre la peine de mort ne me paraît pas insignifiant. N’est-ce pas lui qui disait également « quand on ouvre une école on ferme une prison » ? Certes, Hugo fut dans sa jeunesse un fervent royaliste (amis bretons bonsoir !), il a également soutenu Napoléon Ier (ce dernier qui, avant de sombrer du côté obscure de la force était révolutionnaire)…mais Hugo a également mis en gage sa personne pour des valeurs universelles, de justice, de liberté… »je suis de ceux qui affirment qu’on peut détruire la misère« .
Sur un plan littéraire, il fait également parti de ceux qui ont sorti le Moyen-Age de l’obscurantisme (et donc sans doute entre autre le folklore, et la matière bretonne). Son œuvre n’est pas à dissocier des causes qu’il a défendues. En perpétuelle réflexion, Hugo n’a cessé d’évoluer, de se remettre en question. Son engagement, son parcours n’était sans doute pas toujours exemplaire mais lui même le savait. Plus vieux, il s’est défini comme quelqu’un qui a « traversé beaucoup d’erreurs et d’abberations« .
Je ne suis pas une spécialiste de Victor Hugo, je ne vais pas dresser une liste de ses bonnes et mauvaises actions mais je préfère ne pas intenter un procès à son égard. Je suis d’accord avec Stéphan Lemoigne. Il faut se remettre dans le contexte de l’époque. Sans aduler Hugo, je respecte son engagement qu’il vivait entièrement.
C’est pourquoi je trouve également l’engagement de monsieur Stivell pour défendre la culture celte courageux et précieux.
Il ressort de cet engagement un esprit (breton ?) d’ouverture. Un esprit avec des racines fortes qui s’étendent au delà des frontières et qui nous amènent à respecter chaque culture.
Cependant, j’ai vraiment du mal à me faire une idée sur l’identité bretonne ou l’identité en générale. Tout comme je ne comprends pas le sens de la phrase « L’instinct français est d’éliminer la Bretagne« . Mais cela me met en colère. L’instinct breton divaguerait à ce point de l’instinct français ? N’est-ce pas là dessiner des frontières ?
Je ne me sens ni particulièrement française ni particulièrement bretonne. Quel instinct peut on alors me discerner ?
Pour le moment, je vois surtout que le gouvernement actuel est en train de détruire le pays, d’en faire un tas de ruine qu’il sera difficile de reconstruire.
Je finis mon message par un extrait du livre « le prophète » de Khalil Gibran. Et je vous souhaite une bonne année !
« Et si c’est un despote que vous voulez détrôner, voyez d’abord si son trône en vous est bien détruit.
Car comment un tyran peut-il dominer les libres et les fiers, s’il existe une tyrannie dans leur propre liberté et une honte en leur propre fierté.
Et si c’est une inquiétude que vous voulez chasser, cette inquiétude a été choisie par vous bien plus qu’elle ne vous a été imposée
Et si c’est une peur que vous voulez dissiper, le siège de cette peur est en votre cœur et non dans la main que vous redoutez«
Bonsoir Alice,
Je réagit devant ton intervention pour te dire que j’ai pu constater qu’entre la Bretagne et la france, il y a un bourreau et une victime.
cordialement
de Gaël
Bonjour Gaël,
Merci pour votre réponse !
Mais, le terme de « victime » me gêne un peu. Je ne me sens pas une victime. J’ai aussi profité des avantages d’être née en France, d’avoir eu la scolarité gratuite, des frais d’inscriptions pour la fac peu élevés, la sécu (enfin, pour le moment).
Aussi la notion de « victime » m’évoque La Boétie et la servitude volontaire.
Alors, je préfère éviter de rentrer dans une vision manichéenne.
Je trouve que la Bretagne de part ses artistes, sa culture, sa conscience politique est forte et non désarmée.
Mais je ne comprends sans doute pas la situation bretonne.
J’aimerai savoir ce qu’on veut ?
Vous sentez vous Breton, Français, les deux ?
En tout cas je pense que, plus que la France, c’est l’argent qui est roi. Alors nous avons un État privatisé qui au lieu de rassembler les gens les délient. Comme le disait M.Stivell, c’est la concurrence. Et la Bretagne (bien que particulière 
)entre aussi dans cette idéologie pour moi.
Enfin, tout ça pour dire, qu’on peut se plaindre, se victimiser mais n’avons nous pas nous même une part de responsabilité ?
Désolé, je ne suis pas clair.
Je refais un peu du pub pour « le prophète » ! Bonne journée !
« Vous êtes le chemin et ceux qui cheminent.
Et lorsque l’un d’entre vous tombe, il tombe pour ceux qui sont derrière lui, les prévenant de la pierre d’achoppement.
Oui, et il tombe pour ceux qui sont devant lui, qui bien qu’ayant le pied plus rapide et plus sûr, n’ont pourtant pas écarté la pierre.
Et ceci encore, dût peser lourdement dans vos cœur :
L’assassiné n’est pas irresponsable de son propre assassinat,
Et le juste n’est pas innocent des actions du méchant
Oui, le coupable est souvent la victime de l’offensé
Vous ne pouvez séparer le juste de l’injuste et le bon du méchant ;
Car ils se tiennent tous deux devant la face du soleil, tout comme les fils noir et blanc sont tissés ensemble.«
Demat deoc’h
J’ai peu de temps pour répondre, aussi irai-je à l’essentiel.
Je ne me sens en aucun cas français. Peut-être est-ce mon jeune âge qui me rend aussi révolté, je n’en sais rien. Mais le fait est que tant qu’en France l’identité, la nationalité française, sera imposée, je ne ressentirai aucune affinité particulière avec la France. Bien sûr j’aime la langue française, c’est ma langue maternelle. J’aime les paysages, j’aime tout ce qui fait la France sur le point de vue naturel, mais je n’aime pas son gouvernement, sa politique actuelle, je n’apprécie pas non plus une (hélas) grande partie de son peuple qui revendique une France française. Les Français « pure souche », les Français fiers de leur République Une et Indivisible, les Français heureux de l’expulsion des Roms, les Français qui se limitent à ce que leur présente l’Etat…
Donc personnellement je ne me sens pas du tout intégré à cette France-là, mon identité bretonne est beaucoup plus forte dans le sens où mes sentiments sont énormément plus intenses vis-à-vis de la Bretagne que de la France.
Après, il y a des français tolérants, fort heureusement, mais qui sont un peu noyés dans la masse. Donc si vous me demandez ma nationalité je vous répondrai sans hésiter : Breton.
Bonjour Alice!
pour l’anecdote, hier midi, dans une maison de retraite près de Sancerre dans le département du Cher j’ai rencontré un Guy, très aimable et souriant, la différence principale entre lui et moi était notre âge.
Le pépère devait avoir dans les cinquante ans de plus que moi
je lui ai demandé si il était breton !?
Il a presque rigolé et m’a dit :
« non, je suis Français » !
et bien l’air de rien j’étais heureux sache faire la différence !
Pour la seconde anecdote, hier, toujours sur france inter, j’ai écouté parler un type dont je n’ai pas retenu le nom.
Il parlait d’une ancienne traduction déchiffré d’une langue perdue.
Dans cette traduction il était expliqué un concept:
« Deux nuages se rencontrent pour former un éclair »
En France nous pensons:
« l’éclair surgit car deux nuages se rencontrent »
Subtil différence de langue, énorme différence de pensées!
Et pour la troisième et dernière anecdote,
aujourd’hui je lis votre message courtois et je vous pose cette question:
« qu’aimeriez vous nous faire dire ? »
cordialement
de Gaël
La situation en Grande-Bretagne est quand même plus claire, où l’on peut être Ecossais, anglais, Gallois tout en étant un Britannique. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si pour beaucoup de Français, être Gallois ou Ecossais ne veut rien dire, puisque tous sont « Anglais ». On reproduit outre-Manche ce que l’on a chez nous. Allez dire à un Ecossais qu’il est Anglais !!! Si un Breton vous dit qu’il n’est pas Français, on le méprise ou au mieux on lui rit au nez !
Voila, comme Stéphan Lemoigne le dit, il y a en France une confusion entre citoyenneté et nationalité. Qu’est-ce qui nous empêcherait, au juste, d’être des citoyens français de nationalité bretonne ? Ce qui nous en empêche c’est Paris, sa centralisation, son jacobinisme.
J’ai aussi honte de la France, de son gouvernement, de sa mentalité élitiste, carriériste, ségrégationniste etc. « Les gouvernements, par définition, n’ont pas de conscience » (Albert Camus)
Et justement je ne peux pas rester indifférente.
Ce serait lâcheté pour moi que « d’échapper » à ses problèmes derrière le fait que je suis bretonne car nous avons aussi notre part de responsabilité. (et il faut penser à ceux qui ne sont pas de Bretagne) Alors je me sens faible et nulle ça va sans dire car je ne sais pas dans quelle mesure agir et comment. J’ai le sentiment d’être passive et ma réflexion est maladroite.
Alors, à la question « qu’aimeriez vous nous faire dire ? » Honnêtement je le cherche moi même.
Je constate que certains n’ont pas hésité à lutter pour des idées et ce au delà de leur pays et des frontières.
Je pense à L’affiche rouge : « vingt-trois amoureux de vivre à en mourir« .
Ce qui me dérange, je le redis ce sont des phrases comme « L’instinct français est d’éliminer la Bretagne« . Phrase dont le sens est douteux et qui engendre une haine malsaine. Cela entre (je crois) en contradiction avec l’esprit d’ouverture que vous prônez M.Stivell.
Alors être indigné de la situation bretonne, oui, mais pas dans ce sens.
Je crois en un esprit breton, je respecte ceux qui se sentent Bretons.
Après, on ne se sent pas tous appartenir à une terre précisément. (Ça me fait penser à « être né quelque part » de Leforestier). Je suis fière d’être née en Bretagne. Écouter Alan Stivell m’a donné entre autre envie d’apprendre le breton, je m’intéresse à la culture celte. Mais je ne me sens pas particulièrement bretonne. Ni française comme je l’avais dit dans mon premier message.
C’est pourquoi je vote pour une citoyenneté terrienne !
Allez, cette fois-ci je vais faire l’économie du « prophète » 
Mais je conseille le livre de Jacques Généreux « La Grande Régression »
Bonne fin d’après-midi !
j’ai répondu à l’avance à certaines de ces questions.
J’essaie de trouver les mots qui aident à se comprendre plutôt que ceux qui bloqueraient plutôt la compréhension, essayer d’en trouver les moins discutables.
Dans ces derniers échanges, je vois du vrai dans ce que chacun dit.
Les choses sont bien complexes: l’identité bretonne n’est pas du tout monolithique, comme ne l’est pas la cioyenneté française. Je suis effectivement de nationalité bretonne, ma citoyenneté française, même si elle est imposée, avec l’influence culturelle française, ne sont pas des choses qui ne seraient que négatives.
Peu de temps ce soir pour développer.
Bonne année, bloavezh mat 2011, en tous cas!
alan
Merci Alice pour tes commentaires bien référencés, ce serait agréable de te lire plus souvent sur ce forum !
A galon,