Je ne suis pas bret…

 

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Je ne suis pas breton

(@import)
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Clermont-Ferrand au soir du 23 juillet 2009

Nous étions un public attentif et trop sage.
Certains, comme moi, étaient des initiés depuis belle-lurette et leur premier vinyl…
…mais d’autres, bien plus jeunes ou encore néophytes étaient là par hasard, attirés par les spots, ou par le zéphyr de la harpe, ou encore simplement par l’aubaine d’un concert estival et gratuit.
Nous étions attentifs et trop sages…
…tout à la fois proches et sur nos gardes, guindés et accueillants, ne sachant trop sur quel pied danser car justement nous avions oublié nos pas et nous ne savions plus bien comment interpréter, en réponse aux appels pressants de votre harpes ou de votre bombarde, comment interpréter les enchaînements du « plint » ou de la « gavotte »…  
Nous étions bien trop sage et moi, si proche de la scène, je lisais bien dans votre sourire, moqueur et cependant bienveillant, que vous n’étiez pas dupe de nos allures empotées et que, faute de pouvoir nous entraîner dans quelque gigue endiablée, vous étiez bien convaincu de réussir à nous faire danser dans nos têtes …

Alors vous nous avez tous accordé à votre diapason poétique.
Un à un votre musique nous à pris par la main, nous à pris par le cœur, nous menant à sa suite à travers landes et brumes, fées et marais, forêts ou récifs, au gré d’une première partie géniale et inouïe constituée d’une harmonie subtile et unique de jazz, de trad, de rock et encore de plein d’autres épices musicales dont l’intitulé m’est inconnu mais qui formaient à nos oreilles tantôt un puissant ressac, tantôt un doux hydromel…
Oui Monsieur, je vous soupçonne de nous avoir ensorcelé, d’avoir transformé en quelques mouvements notre foule polie en un public captif, fasciné, enchanté, et dévoué à vous suivre à travers toutes les extravagances, subtiles et précises, d’une musique à nulle autre pareille, s’abreuvant au fond des âges mais sonnant pourtant avec une extraordinaire modernité…
Et puis… et puis quand nous fumes tous conquis et quand chacun d’entre nous fut devenu une corde de votre harpe, alors vous nous avez embringués dans une suite effrénée de ces « standards » anciens qui sont, au cœur de beaucoup d’entre nous, l’équivalent de ce que pourrait être une galette de Pont-Aven à un Proust armoricain …
…Tri martelod yo-ho, lalala lalalala…

A ce moment là chacun autour de moi paraissait vibrer… Certains se dandinaient, d’autres tressautaient, ceux ci chaloupaient et ceux là balançaient d’un pieds sur l’autre… Tous, comme moi, étaient démangés par l’envie de danser. J’étais parcouru d’un désir difficilement répressible d’accrocher mon auriculaire à celui de ma voisine afin de lancer, dans la foule trop sage, une amorce de sarabande…
… mais, comme mes voisins, j’avais oublié mes pas de danse bretonne et, comme eux, je me suis cantonné à danser dans ma tête…

Ce doit être un moment unique, pour vous qui êtes sur la scène, que le spectacle de tous ces esprits dansants…

En tout cas merci…
Merci pour ce concert magique, merci pour votre talent, pour votre gentillesse, pour votre humanité, pour votre espièglerie et votre humilité, merci pour les émotions et pour la musique, merci de nous avoir fait tout de même danser, nous les empotés…

Yann

(Post-scriptum:
Je ne suis pas breton mais, par la grâce de ce prénom que m’ont donné mes parents, j’emporte avec moi de façon congénitale un petit morceau de Bretagne.
Ainsi quand j’étais petit et banlieusard, quand je n’étais de nulle part, la Bretagne représentait-elle pour moi un berceau fantasmatique. Adolescent, votre musique finit de me convertir et depuis cette époque à défaut d’être un breton, je suis un breton chimérique…)

Citation

Posté : 25/07/2009 1:16 am


 alan

(@alan)
Membre Moderator Registered

Vos mots me touchent infiniment. Merci!
Kenavo,
alan

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Posté : 26/07/2009 8:44 pm

(@gwenvael)
Membre Admin

 

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