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Deiz-ha-bloaz laouen, Happy Birthday, Bon Anniversaire

(@clarinda)
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Deiz-ha-bloaz laouen deoc’h, Alan! (Un jour après !)

 

Et une année joyeuse à vous, à vos proches, et à tout le monde!

 

Ce n’est sûrement pas par hasard que vous êtes né le jour de l’Épiphanie, car votre parcour se signale par des Ephiphanies artistiques extraordinaires, depuis la renaissance de la harpe celtique par vous et votre père, et ainsi de suite toujours à partir de ce moment-là !

 

C’est vrai ce que vous avez écrit dans votre belle autobiographie, que votre histoire, avec les thèmes que nous connaissons, est bien « digne d’un conte » !  Et il y a tellement de motifs : votre naissance en même temps que la naissance de la harpe celtique, les trois frères, les trois dons.  Je m’émerveille de cette belle  histoire, et cela m’a donné envie d’écrire un tel conte, alors, si vous me le permettez, comme petit cadeau d’anniversaire, à la manière d’un conte traditionnel breton, « L’Enfant et la harpe » !  C’est ma première tentative d’écrire un conte en français, alors je vous prie de pardonnez-moi pour les erreurs !

 

J’apprécie profondément vos conseils pour 2025 !  La nature, la musique, les arts nourrissent l’âme, et nous donnent courage et sérénité pour les défis qui nous attendent en 2025.  Je prends ce conseil au sérieux, tous les jours, et je vous en remercie sincèrement.

 

A galon,

Clarinda

 

 

L’Enfant et la harpe

Un Nouveau Conte Breton

par Clarinda White

 

Deiz-ha-bloaz laouen deoc’h, Alan

 

Á l’époque de ma naissance, mon pѐre commence à rêver de faire renaître la harpe celtique…C’est un beau hazard, digne d’un conte, que je sois concu là, et au moment où germa l’idée de cette renaissance.

                                                                        —  Stivell par Alan [1]

                                                                                                         

Il était une fois un homme d’un duché sur la côte de la mer la plus occidentale du monde. Du moins, c’était autrefois un duché, avant qu’un pays plus jeune mais plus grand ne l’engloutisse. Parfois, les vagues fouettaient la terre, parfois la mer nourrissait la terre comme une mère !

Cet homme, nommé Jord, voulait comprendre tout ce qu’il y avait à comprendre, et à créer de nouvelles choses. Il avait voyagé dans le monde entier au cours d’une longue vie et avait fait déjà beaucoup de choses. Il est même devenu un guerrier et a combattu dans des guerres avec courage et vaillance, pour protéger les autres, bien qu’il ait été blessé et emprisonné. Or, en temps de guerre, disait-on, il a risqué sa vie pour empêcher une aubépine – un arbre féerique – d’être fauchée par un char. La fée de l’aubépine lui aura accordé le désir de son cœur, c’est-à-dire de comprendre et de créer instantanément, afin de se dispenser de l’apprentissage et développer plus de compréhension et de sagesse dans ses années mortelles.  Mais d’autres n’y croyaient pas et insistaient sur le fait (à peine moins magique) que Jord était tout simplement un étudiant brillant, doté d’une perspicacité et d’une invention fulgurantes.  En tout cas, s’il voulait savoir quelque chose, il n’avait pas besoin de perdre de temps pour l’apprendre, mais semblait l’absorber comme une éponge. Pour inventer des choses inouïes ou faire revivre des choses perdues, qu’il s’agisse d’une machine pour améliorer la vision, ou de tableaux pour montrer comment il voit le monde, il les a achevés sans perte de temps et sans difficulté, soit grâce à une fée aussi belle que des fleurs d’aubépine, soit grâce à sa rapidité d’appréhension.

Mais il arriva un moment où il ne suffisait plus à Jord de nourrir son esprit, avide de connaissance, et son âme, avide de créer. C’était le jour où son cœur grandissait pour admettre un nouveau désir, le cœur et la main d’une belle et vive jeune fille qu’il avait rencontrée, dont le nom mystérieux signifiait “bonne.”   Et cette jeune fille, au cœur plein d’amour et de tendresse – non seulement pour Jord, mais pour tous les êtres – pleine de sagesse et d’un fort esprit de justice et de compassion – lui a donné sa main.

Avec le temps, ils ont eu un beau et bon fils, et Jord, qui aimait aussi la musique et l’ébénisterie, a décidé de fabriquer un instrument de musique de ses propres mains, pour accueillir cet enfant (et tous les autres qu’ils pourraient avoir) dans le monde. Parce que Jord était d’avis que peut-être des vibrations constituaient tout. Donc être capable de créer de bonnes vibrations, c’est être capable de refaire le monde ! (C’est ce qu’il avait vu gravé dans les murs de pierre de Gavrinis, une ancienne tombe à couloir vieille de 6 000 ans sur une île du golfe du Morbihan – des vibrations rayonnées par une déesse !) Par conséquent, a-t-il raisonné, avec la capacité de créer de bonnes vibrations, il est possible de tout faire, de faire et de refaire le monde. Quoi de mieux pour bien accueillir un enfant dans un monde de vibrations que de lui donner les moyens de les créer lui-même ! Et la musique ne naît-elle pas des vibrations ? Ainsi, pour son premier enfant qui aimait la mer, Jord a construit une belle guitare. Et comme il l’a faite comme il a fait tout ce qu’il a fait, cette guitare était la meilleure qu’elle pouvait etre.

Puis vint un second fils, beau et bon, qui aimait la terre, et pour l’accueillir et lui faire du bien, Jord fit le plus beau violon possible. Ses fils jouaient bien la musique tous les deux, et Jord était content, même si finalement, ses deux fils préféraient la bombarde et le binioù ! Et il en fut ainsi, pendant de nombreuses années, tandis que leurs deux fils grandissaient.

Un jour, alors qu’il se promenait dans la forêt, Jord a pris conscience du bruit du vent dans les branches et les feuilles et cela ressemblait à la voix d’une harpe chantant son nom. « Jo-ord ! » Il a regardé autour de lui, mais il n’y avait personne, et il a continué son chemin… Quand apparut devant lui un arbre courbé comme une harpe, avec quelques branches droites qui s’élevaient droites comme des cordes de harpe ! Et à partir de ce moment-là, Jord est devenu obsédé par la création d’une harpe. Mais pas n’importe laquelle. Une harpe pour consoler les rois et ducs d’autrefois de son pays. Une harpe pour faire rire les gens, pour les faire pleurer, pour les endormir, une harpe telle que personne n’en avait joué ni entendu depuis l’époque des ducs et des rois de son pays bien-aimé, quand la harpe faisait danser les chevaliers et les belles dames, ainsi que les paysans dans leurs fêtes sylvestres et fêtes champêtres après avoir travaillé dans leurs champs, ou près du foyer des humbles comme des puissants, pour les soulager et les faire rêver. Une harpe bretonne de son pays… Mais comment?! Il n’y avait pas eu une telle harpe construite depuis des siècles ! Il y avait de quoi réfléchir ! Et ce serait une surprise ! Peut-être que sa femme s’amuserait un peu à jouer avec…

Mais en même temps, la femme de Jord, elle aussi, travaillait sur quelque chose d’imprévu, et quand elle lui a révélé sa grande surprise, c’était qu’il y aurait un autre enfant !  « Cette fois, » elle a dit avec conviction, « une fille ! »

Ainsi, le bébé et la harpe se préparaient en même temps à faire leur entrée dans le monde. Le bébé est arrivé le premier. Et il était encore un fils ! Mais fils ou fille, n’importe pas du tout.  Il était si beau, si bon, si charmant, si gai, si doux, avec ses grands et beaux yeux, pleins de merveilles comme ceux de sa mère, que sa mère ne pouvait s’empêcher de l’adorer de tout le grand amour et tendresse de son coeur et d’être ravie, enchantée, de lui, et toutes ses connaissances étaient d’accord. Et cet enfant aimait l’air.

Mais aucun cadeau musical n’était prêt pour accuillir ce troisiѐme enfant ! Parce que la harpe était un rêve, et qu’on n’a pas de rêves sur commande ! Le rêve se tisse dans son propre temps, ou mieux, en dehors du temps. Peu importe, le père, la mère, les deux frères aînés, les cousins, tous lui faisaient un accueil chaleureux, et la harpe se développait avec l’enfant, jusqu’à peu aprѐs sa neuvième anniversaire, lorsque la harpe celtique créée par son père, sculptée de toutes les fleurs d’un jardin secret, a reçu sa première corde, et que le garçon l’a pinçé pour la première fois.

Et alors, deux choses se sont produites.

Cette corde était l’argent du chant de la lune, avec le trémolo de l’étoile la plus brillante du ciel.  C’était un frisson, et un coup de foudre pour le jeune. Pendant de longs instants, le garçon n’a vu que les rayons, et n’a entendu rien d’autre que la vibration de cette corde d’argent, première corde de la création de son univers.  Et la réverbération de cette corde était son destin, toute sa vie, incluse dans cette note.  Pour lui, cette corde vibrerait (dans son âme, son cœur) toute sa vie!

Et deuxièmement, le garçon, et tous ceux présents dans cette pièce – et tous ceux qui l’entendraient jouer à partir de ce moment-là – comprennent quelque chose d’aussi profond qu’évident. C’est que le garçon, qui s’appelait Alan, et la harpe, qui s’appelait Telenn gentañ, qui avaient été conçus ensemble, n’avaient qu’une seule âme entre eux, ils partageaient les deux moitiés de la même âme. Et c’est quand Alan a pincé la première corde de la harpe pour la première fois, que les deux moitiés de son âme se sont retrouvées, devenant entières, pour le garçon comme pour la harpe, à partir de ce moment jusqu’à toujours ! La harpe et le garçon étaient nés l’un pour l’autre !

Beaucoup plus tard, il a écrit,

La premiѐre corde est tendue début avril: mon coup de foudre est absolu !  Le son est réellement divin….

Cette premiѐre corde semblait être tendue entre le ciel et la terre, entre le présent et le passé, dans un temps indécis où s’enlacent l’histoire et la légende.  Entre le ciel et la terre, tendue, oui, elle l’était réellement, et le doigt d’un enfant, d’une seule note, lui fit prendre vie.  À ce moment précis, ce fut comme un sѐve qui montait en moi. [1]

On dit que lui aussi, comme son père, a fait une bonne action pour une fée, et à cause de cela, elle lui a appris à jouer de la harpe. Qu’un jour, dans la forêt, le garçon a rencontré une vieille femme qui ramassait du bois. Il l’a aidé, et immédiatement elle s’est montrée être la même belle fée qui veillait sur son père, puis elle commençait à lui apprendre à jouer de la harpe. Il a appris à jouer les chansons qui faisaient rire les gens de joie et d’allégresse, les chansons qui faisaient pleurer les gens pour soulager leur cœur de chagrin et les chansons qui apportaient aux gens le baume du sommeil. Il a appris à jouer les chansons qui donnaient envie aux gens de danser. 

Et la fée a appris à la harpe, la Telenn gentañ, à tisser des ondes sonores dans un pont pour transporter des auditeurs vers d’autres mondes.

Une fois les autres cordes tendues, et avec un bonne guide et enseignante, le garçon a appri à jouer presque dès qu’il a commençé, comme s’il savait avant de savoir qu’il savait, et en cela il ressemblait beaucoup à son père. Mais il a joué avec la tendresse et l’amour qui remplissaient le cœur de sa mère. Il aimait tous les genres de musique, mais la musique que sa harpe aimait le plus jouer était la musique de son pays, des sons qui n’avaient pas dansé dans l’air depuis que leur pays était encore libre ! Avec, bien sûr, la musique de toutes les terres celtiques voisines !  Car il ne s’agissait pas uniquement d’une harpe bretonne, mais d’une harpe celtique, pour ravir et rejouir toute la Celtie. (Et finalement, tout le monde partout le monde !)

Bientôt, Alan a commencé à jouer là où les autres pouvaient l’entendre.  Il semblait comme le jeune Taliesin au front radieux de légende, le barde du temps du roi Arthur au pays de Galles. Et beaucoup de ceux qui l’entendaient rêvaient de jouer eux-mêmes d’une harpe aussi belle, magique, et merveilleuse ! Bientôt, le rêve du père et du fils commençe à se réaliser, et le son de la harpe celtique de Bretagne résonne à nouveau dans tout le pays. Et le garçon Alan a commencé à chanter… Et il chante dans une nouvelle langue étrange. Les jeunes ont été surpris d’apprendre que c’était leur propre langue, et qu’elle était ancienne ! Et en l’entendant chanter avec tant d’enchantement, comme une incantation magique, ceux qui l’avaient oublié se hâtaient de la réapprendre eux-mêmes, et ceux qui le prononçaient encore le prononçaient avec plus de fierté. Bientôt, beaucoup commençaient à redécouvrir et à chanter les chansons de leur pays.

Depuis que la Bretagne avait perdu sa liberté, il n’y avait pas eu une telle harpe. L’amour d’Alan pour la harpe de sa terre a suscité un amour profond pour sa terre, qui inspire ceux qui l’entendent jouer. La harpe elle-même fait appel à cet amour de la liberté. C’était comme si la harpe celtique, qui a décliné et disparu lorsque la terre a perdu sa liberté, ne pouvait s’épanouir que sur une terre de liberté. La harpe des bardes et des poѐtes, de retrouver le temps de la liberté politique et culturelle. « The Minstrel Boy » (“Le garçon ménestrel”) du barde irlandais Thomas Moore s’addresse à sa harpe :

 

      No chains shall sully thee,
Thou soul of love and bravery!

   Thy songs were made for the pure and free,
They shall never sound in slavery!

 

Ҫa veut dire, « Aucune chaîne ne te souillera, Âme d’amour et de bravoure ! Tes chants ont été faits pour les purs et les libres, Ils ne sonneront jamais dans l’esclavage !

Sa mère a inspiré à Alan la force de l’indignation juste face à l’injustice envers les autres.

Alan, comme son père, apprend rapidement ce qui l’intéresse et aime innover. Sa musique, inspirée de la musique traditionnelle celtique, ne cesse d’évoluer. Alan est toujours passionné par la découverte de nouvelles possibilités !

Le frère aîné d’Alan, qui aimait l’eau, navigue les mers. Son deuxième frère, qui aimait la terre, a appris à en prendre soin… et Alan, qui aimait l’air, a pris son envol et remplit l’air de musique !

Cette musique et son rêve de liberté pour son pays, il les avait à cœur. Mais lorsqu’il rencontre une belle princesse pleine d’esprit et de sagesse, il découvre qu’elle a toujours été dans son cœur, comme s’il avait toujours su. La bonne reine sa mère les bénit, la princesse et le harpeur unissent leurs vies, et avec deux fils beaux et bons, ils vivent heureux pour toujours. 

Le grand barde de la lointaine Grèce, Orphée, charmait même les animaux, même les pierres, avec sa musique, tout comme Alan ! Car les animaux aiment la harpe d’Alan, et les pierres levés, les menhirs, j’en suis sûr, dansent la nuit, quand personne ne les regarde ! Mais Orphée est descendu dans l’Hadès, la terre des ténèbres, pour émouvoir les dieux des morts avec sa musique. Alors qu’Alan a escaladé les hauteurs de la montagne Olympia, où règnent les Muses, pour invoquer les pouvoirs de la lumière. Il a joué pour les dieux de l’Olympia, il a remporté sa couronne de laurier de la victoire.

Alan voyage le monde entier et joue avec tous les musiciens qu’il rencontre, mêlant des harmonies de leurs pays pour créer des chansons magiques, merveilleux et nouveau. Une fois, d’un chaman dans la forêt, Alan a appris l’alchimie de transformer la musique en paix et liberté.

Autre don de la fée, Alan possѐde la jeunesse eternelle, jeunesse de l’esprit, de la voix, de l’inspiration—comme s’il peut passer à son gré entre la Terre et Tir na nÓg, la terre des toujours jeunes.

Dans une forêt de Bretagne, il y a une fontaine où les rayons de lumière et les ondulations de l’eau se mêlent, ne font qu’un. La lumière et les eaux scintillent et vibrent, formant ensemble un chant. Au fil des années, la lumière qui brille de la harpe d’Alan devient plus brillante, et la lumière qui chante dans son cœur devient de plus en plus rayonnante, cette lumière qui résonne aussi ! Et ainsi chante la harpe d’Alan : « Si chacun de nous laisse briller notre lumière à nous, et si chacun chante sa chanson, ensemble nous pouvons faire de la Terre brillante un paradis d’harmonies mêlees. »

FIN

[1]  Stivell par Alan, Une Vie, la Bretagne, la musique/Ur Vuhez, Breizh, ar Sonerezh. Alan Stivell, Editions Ouest-France, 2023, page 27.

 

Image, “La prophétie de Merlin”

La Bretagne en bandes desinées, Pierre Watrin, Jean Markale, Librairie Larousse 1982, page 46

 

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Début du sujet Posté : 07/01/2025 11:53 pm

 

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